PREMIERE PLUIE D'AUTOMNE


Pluie un peu oubliée aux charmes de l'été,
Dans la douceur de vivre et la chaude lumière,
D'un doigt encor timide et quand même entêté,
Frappant à mon volet, te voici la première,
Hélas, à m'annoncer : «les beaux jours sont finis ! »
Et les yeux grands ouverts, dans la nuit apaisée,
Je perçois au jardin des bruits indéfinis ;
En deviner la cause est chose malaisée.
On dirait qu'au dehors, dans la rumeur de voix
Qui chuchotent dans l'ombre et de malles traînées,
Quelqu'un vienne et quelqu'un parte, sans autre choix
Que ce hâtif exil des reines détrônées.
Me voici prisonnier, ô pluie, et dans ma tour
Déjà rongé d'ennui par l'absence cruelle.
Araignée à l'affût, fil par fil, jour par jour,
Tu tisseras la toile aux mailles ponctuelles,
Pour surprendre ma joie, en faire ton festin.
Tout mon être contraint à cette servitude,
Trop las pour m'évader, il faudra, au matin,
Endurer le premier des jours de solitude.

Giens le 15 octobre 1995