MISTRAL

Le vent, comme un alcool, nous verse son ivresse,
Qui nous tourne la tête et brouille nos regards
Et de sa main bourrue, aux rugueuses caresses,
Nous malmène et rudoie et nous laisse hagards.
Il courbe les cyprès vers la terre orgueilleuse,
Silhouettes en deuil qui parcourent les champs,
Avec le dos cassé de ces vieilles glaneuses
Dont l'ombre pitoyable attriste le couchant.
Là tout lui est soumis, il efface l'obstacle,
L'espace est son royaume où il n'a nul rival
Et l'oiseau capturé, qu'emporté la débâcle,
Ne peut se dérober, saisi d'un poing brutal.
Tel un étalon blanc jaillit des marécages,
D'un galop triomphant il conquiert le delta,
De l'écume au poitrail il franchit le rivage,
Emporté au jeu fou d'une fantasia.

Giens le 6 octobre 2003